L'OMBRE D'UN MENSONGE

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Bouli Lanners est un cas à part dans le cinéma belge. Que ce soit en étant un des rares à pratiquer devant et derrière la caméra. Mais sans doute aussi par une autre spécificité, cette propension à porter en lui une sorte de mélancolie naturelle.

L'ombre d'un mensonge, son cinquième long métrage, est cependant le premier qui l'assume pleinement,  notamment par ses deux protagonistes principaux. Phil et Millie sont deux grands cabossés par la vie. Le premier, physiquement quand un énième AVC, le fragilise mais surtout le laisse amnésique. La seconde, cloitrée dans sa réputation de vieille fille acariâtre. Et pourtant, l'accident cérébral va être une occasion de leur offrir une seconde adolescence. 

Au vent qui souffle sur l'aride île écossaise où se déroule L'ombre d'un mensonge, en succède un autre, celui de l'urgence pour Phil et Millie de rattraper un potentiel temps perdu, mais plus encore une possible vie oubliée. Lanners s'évertuant à aventurer son cinéma, un nouveau chemin, celui des grands (et beaux) sentiments.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver LOCAL HERO (Le film de Lars Von Trier se déroule sur la même île que celle de L'ombre d'un mensonge. Dans cette comédie, l'implantation d'un complexe pétrolier se déroule aussi sur une île écossaise) ou encore BREAKING THE WAVES (Le film de Lars Von Trier se déroule sur la même île que celle de L'ombre d'un mensonge.).

Si un motif marque les films réalisés par Bouli Lanners, c'est une certaine idée de la tangente :  Ultranova, Eldorado, Les géants ou Les premiers, les derniers ont beau avoir des scénarios des plus variés, tous se rejoignent dans cette envie d'aller voir ailleurs, de se confronter aux codes du road movie. L'ombre d'un mensonge se distingue cependant en étant celui qui aura emmené son auteur le plus loin. C'est en dehors de sa Belgique chérie que Lanners est allé tourner, sur une autre terre qu'il affectionne au point d'en avoir fait un lieu récurrent de vacances : l'Ecosse. Initialement avec l'idée de signer un polar. 

L'ombre d'un mensonge deviendra pour autant une histoire d'amour. De l'aveu même de Lanners, parce qu'il arrivait à un âge où il avait suffisamment de recul sur le sujet pour pouvoir enfin se permettre de l'aborder. Mais aussi par l'envie d'une rupture avec ses quatre films précédents. D'où le besoin d'un autre pays, d'une autre équipe technique et d'une autre langue, ce cinquième opus étant tourné en anglais. L'île de Lewis, partie de l'Ecosse ayant conservé sa culture et ses traditions gaéliques comme celle d'une église presbytérienne avait tout pour couper Lanners de son univers usuel de cinéma. Y compris dans cette sensation de terrain délimité, de vie en monde clos, là où ses films précédents tendaient vers une fuite. 

Il y a pourtant plusieurs attaches avec la Belgique dans L'ombre d'un mensonge, que ce soit le compagnonnage avec Tim Mielants, compatriote et réalisateur (entre autres de la plupart des épisodes de la série Peaky Blinders) embarqué en soutien sur ce projet. Et plus encore cette idée de superposer les paysages rudes de cette île écossaises à celle des plateaux ardennais dont Lanners est originaire. Car si Phil est amnésique, l'acteur-réalisateur lui n'a rien oublié d'une enfance en communauté rurale aux mœurs proches de celle de l'île de Lewis : rugueuse, pudique jusqu'à dissimuler derrière cette façade ces sentiments comme ses souffrances. Au delà d'une splendide romance entre deux êtres qui se sont ratés, c'est aussi cette vérité qu'exprime  L'ombre d'un mensonge.

Bouli Lanners nous démontre une fois de plus que derrière sa carapace de brute épaisse ultra-tatouée se cache une sensibilité à fleur de peau, un romantisme presque fleur bleue mais nullement niais. J'avais adoré Les premiers, les derniers pour cette même raison ; Bouli ...

Il y a de nombreux moments de pure beauté dans L'ombre d'un mensonge et ils ne sont pas uniquement dus à la splendeur sauvage des côtes écossaises. Bouli Lanners a été bien inspiré de s'oxygéner pour sa nouvelle réalisation qui s'avère être sa plus probante et touchante. ...

Bouli Lanners était parvenu à devenir l’un des rares paysagistes de la Belgique au fil d’une filmographie résolument locale, qui faisait la part belle aux hommes de tous âges, évoluant le plus souvent dans les marges. Son nouveau projet montre une ambition nouvelle : en ...