QUIÉN TE CANTARÁ

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En 2014, La nina del fuego avait permis de découvrir la voix particulière d’un cinéaste espagnol, Carlos Vermut. Venant de la BD underground, il jongle dans ses avec la culture pop contemporaine comme avec les mélos à l’ancienne, au point d’être devenu en à peine trois films, un successeur de Pedro Almodovar dans sa capacité à mêler peinture sociale et sentiments hauts en couleur.

Quien te Cantara fait se rencontrer une chanteuse devenue amnésique alors qu’elle doit faire son retour scène et une de ses plus grandes admiratrices qui reprend ses morceaux dans des bars. Une histoire de fan donc mais surtout une histoire de femmes cassées par la vie, hantées par des drames du passé.

Vermut en fait un film tout de faux-semblants mais en vrai adorateur de cinéma, Quien te Cantara invoquant la part baroque d’un De Palma comme la glaciation des rapports humains d’un Bergman pour éclairer la mise en miroir de deux femmes à l’opposé sur l’échelle sociale mais réunies dans leurs solitudes.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver PERSONA (Dans ce classique de Bergman, une actrice perd la parole et se reconstruit grace à une autre femme. Tout comme Lila dans Quien te cantara, perd la mémoire et se retrouve grâce à Violeta) ou encore THE ROSE (Une évocation de la face sombre d'une star de la chanson, inspirée du parcours de Janis Joplin).

Dans La nina del fuego, une gamine obsédée par le costume d’un personnage d’une série de japanimation déclenchait un tragique enchaînement de situations. Un point de départ témoignant de la fascination de Carlos Vermut pour la culture japonaise. Celui de Quien te cantara est sans doute similaire tant ce film-là est marqué par l’idée du karaoké. Pratiquement quand Violeta s’incarne pleinement en le pratiquant dans des bars pour chanter les tubes de Lila Cassen, métaphoriquement quand Quien te cantara parle d’imitation, d’usurpation d’identité. Vermut y fait du Karaoké une machine à chimères où ses personnages se perdent autant qu’ils se construisent.

Vermut a joué sur cette notion de trouble jusqu’à renouer avec une tradition du cinéma espagnol pour mieux la tordre. Dans les années 60 et 70, il était fréquent que des vedettes de la chanson deviennent les vedettes de films populaires. Najwa Nimri a fait le chemin inverse en ayant d’abord été une icône du jeune cinéma espagnol dans les années 90 – on l’a vue entre autres chez Alejandro Amenabar ou Julio Medem – avant de devenir une vedette de la chanson. Celles de Quien te cantara sont d’ailleurs inspirées de ses tubes. Les autres éléments de la personnalité de Lila seront inspirés de Naomi Chiaki, une chanteuse japonaise qui s’est soudainement retirée de la vie publique après la mort de son mari.

Quien te cantara réfute pour autant tout lien avec une réalité du show-business en travaillant ses artifices. Au dela de Nimri, Lila est incarnée par un style vestimentaire et une gamme de couleurs tirant sur le rose quand Violeta est filmée dans des teintes bleutées, plus sombres. De même, toutes les séquences en intérieur ont été tournées à Madrid et celles en extérieur en Andalousie. A l’inverse, le scénario revient régulièrement sur les ressemblances physiques et psychologiques entre les deux femmes aux destins totalement différents mais souffrant d’un même désamour. Quien te cantara les fusionnant dans un poignant chant de lamentations.

QUIÉN TE CANTARA (14,2) (Carlos Vermut, ESP, 2018, 109min) : Ce long métrage se décline comme un intrigant thriller psychologique musical. Carlos Vermut dévoile de subtils portraits de femmes à travers des quêtes identitaires et des impostures. Le réalisateur livre une ...

J'aurais pu mettre 8, mais la fin m'a laissé dubitatif, ne sachant pas quel personnage on aperçoit, même si je pense que c'est l'ancienne chanteuse, quoique... En tous les cas le travail artistique dans ce film est remarquable, entre les chansons inventées (du moins je crois), ...

Celui qui prétendrait qu'affliger son personnage majeur d'amnésie, au cinéma comme en littérature, fait preuve de facilité narrative, aurait sans doute raison Ceci posé, Carlos Vermut n'en abuse pas dans Quién te cantará, ce n'est qu'un élément parmi d'autres dans ce ...