LUBO

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Le sujet de Lubo est absolument passionnant. Dès les années 1920, le projet « Les Enfants de la grand-route » en Suisse organise l’enlèvement et le placement des enfants Yéniches (une communauté des gens du voyage). Le but aurait été d’éduquer et de faire de ces nomades de bons citoyens. Lubo prend cette tragédie en point de départ, avec ce personnage éponyme qui non seulement voit ses enfants capturés, mais aussi sa femme tuée, et est forcé de s’engager dans l’armée. Sur plus de 30 ans, Lubo lutte, dissimule, refait sa vie et cherche à retrouver ses enfants disparus.  

Cette grande fresque historique, réalisée par Giorgio Diritti, se donne les moyens de ses ambitions. Les reconstitutions d’époques sont magnifiques, la photo incroyable. Avec ses vieilles bâtisses et ses paysages montagneux, Lubo n’est pas sans rappeler les grandioses images d’Une vie cachée de Terrence Malick, situé lui dans les Alpes autrichiennes.  

Lubo ne se contente pas de se pencher sur le sort des Yéniches, il raconte la folle vie de cet homme aux multiples visages. On pense par moments aux grands contes philosophiques d’antan, ou à Martin Eden quant à la durée de l’aventure. Lubo est aussi un film de langues – allemand, italien, un peu de français – qui rappelle à quel point la Suisse est à la confluence de plusieurs cultures, et qu’elle doit constamment jongler avec sa neutralité. Pourtant, ce que fait découvrir le film, c’est que la confédération n’est pas que cette contrée pure : elle porte aussi en son sein des sévices, des outrages et des crimes.  

Franz Rogowski porte cette histoire de tout son charisme. L’acteur fétiche de Christian Petzold, également vu dans Passages d’Ira Sachs ou encore Happy End de Michael Haneke, se dévoue pour ce rôle. Aussi à l’aise en jongleur-amuseur yéniche qu’en négociant et intriguant pendant la Seconde Guerre mondiale, l’acteur montre l'étendue de sa palette de jeu. Il confère à Lubo une dimension romanesque que peu seraient capable d'offrir.